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Tout sur l'émission "Jeux sans frontières"

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CLAUDIO LIPPI, présentateur italien

30 avr 2009 • Catégorie(s) : Interviews

Claudio Lippi

Présentateur très populaire de l’autre côté des Alpes, Claudio Lippi est célèbre pour avoir animé des émissions de divertissement et de jeu à grand succès. Avec grande simplicité et sympathie, il a accepté de se souvenir avec nous de ses « Jeux sans frontières »… En voici la traduction. 

Sébastien Dias (JSfnet France) : Comme vous savez, les « Jeux » ne sont plus diffusés à la télévision, ni en Italie, ni en Europe…
Claudio Lippi, présentateur pour l’Italie (1988 à 1990) :
  Je le regrette beaucoup. En Italie, toutes les personnes que je rencontre regrettent « Jeux sans frontières ». Pendant de nombreuses années, « Jeux sans frontières » a été un très grand succès dans tous les pays qui l’ont diffusé. Et on en appelait à « Jeux sans frontières » quand il y avait les frontières ; aujourd’hui que nous pourrions les faire vraiment sans frontières, que l’Europe est presque unie, les Jeux ne sont plus là. Et je crois vraiment que c’est une grosse erreur, parce que c’est une émission pleine de curiosité, de joie, de fête et de bonheur, une façon de faire découvrir des lieux qu’on ne peut peut-être pas toujours aller visiter. Pour moi et très certainement pour les téléspectateurs, il y a un grand regret et je ne comprends pas pourquoi ils n’existent plus.

JSfnet : On a parlé d’un problème de coût de production et d’organisation au sein de l’Eurovision…
C.L. :
Certes. Mais aujourd’hui, surtout en Italie, il existe des émissions qui coûtent des millions et qui ne font pas beaucoup de résultat. Nous devrions peut-être y réfléchir, peut-être en s’unissant tous et en essayant de re-proposer les Jeux à nos chaînes de télévision. J’espère vraiment qu’on puisse les faire de nouveau.

JSfnet : Il y a aussi cette mode qui privilégie la télé réalité, en laissant de moins en moins de place aux divertissements…
C.L. :
Nous réduisons beaucoup le temps accordé aux divertissements, et je crois que c’est très grave pour la télévision italienne. Les divertissements coûtent cher, mais selon moi on pourrait continuer à en faire en faisant des économies, il suffirait d’avoir plus d’idées. En Italie, on manque de créativité.

JSfnet : Présenter « Jeux sans frontières » a été pour vous quelque chose de très important, non ?
C.L. :
Probablement l’émission la plus amusante que j’ai faite en tant d’années de télévision, même si c’est fatigant… : pour bien le faire, il ne suffit pas de commenter ce qui se passe pendant que les équipes jouent ! Cela, c’était pour moi le plus simple, le plus amusant et le moins éprouvant. La fatigue se faisait sentir au moment des nombreux voyages vers les différents pays. Il fallait aussi essayer d’avoir des informations, non seulement sur les joueurs de sa propre équipe, mais aussi sur ceux des autres équipes parce que je trouvais très important de mettre en avant les personnes qui jouaient, sans oublier pour autant l’esprit de compétition… En ce temps-là, on faisait jouer la mère de famille, l’employé, l’athlète local… Il était très important pour moi de savoir ce que les concurrents faisaient dans la vie.

JSfnet : En effet, cela s’est perdu au cours des dernières années : les équipes recherchaient des athlètes toujours mieux préparés, pour gagner à tout prix…
C.L. :
 J’ai vu qu’après mon départ, il n’y avait plus de spécialisation. Nous, à l’époque, nous avions le boulanger, l’ouvrier, l’instituteur, et au mieux le professeur de sport !

JSfnet : Mais pour gagner contre les champions hongrois ou tchèques, qui sont arrivés ensuite, ça ne suffisait plus… Peut-être que des athlètes aussi préparés ont un peu écorné l’esprit initial de l’émission…
C.L. :
Tu as certainement raison : les « Jeux » devaient rester des jeux. En devenant des compétitions sportives, ils ont perdu leur charme. Je me souviens surtout des Français et des Portugais qui se préparaient, qui s’entraînaient, avec beaucoup d’efforts, toute l’année, pour être prêts pour l’année suivante. Mais pas comme des athlètes : avec beaucoup de cœur à l’ouvrage. C’est cela qui était beau ! Et puis, c’était une excellente occasion pour montrer union et amitié. Je me souviens des fêtes après l’émission : beaucoup de passion durant les jeux, parce que personne ne voulait perdre, mais, à la fin, peu importait qui avait gagné… Des fêtes vraiment merveilleuses : ils ne se comprenaient pas toujours, mais je t’assure que j’ai vu naître des histoires d’amour ou d’amitié. Une ambiance très belle !

JSfnet : C’est donc peut-être votre plus beau souvenir ?
C.L. :
C’est mon plus beau souvenir, avec la grande hospitalité de tous les pays, dans chaque ville. Le cœur de la ville s’arrêtait de battre, et les « Jeux » devenaient une fête nationale. Je me souviens de l’accueil, des cadeaux que faisaient les municipalités aux présentateurs. Je t’assure que j’ai des souvenirs qu’aucune autre émission pourra me laisser. A chaque fois, un moment extraordinaire : chaque fonctionnaire, chaque dirigeant y mettaient la même passion que les concurrents. Il n’y a jamais eu dans l’histoire de la télévision un engouement aussi fort chez tous ceux qui travaillaient, même chez les menuisiers et les peintres qui construisaient les décors ! Dans une émission comme « Jeux sans frontières » où l’on oublie les langues, où le jeu devient le dénominateur commun, régnait une atmosphère amicale : encouragements, participation saine et non-violente, litiges, contestations aussi mais sans jamais aucun dérapage. « Jeux sans frontières » est devenu ce que De Coubertin voulait pour les Jeux Olympiques. Aujourd’hui, le sport est sali par la violence, à cause de l’argent qu’il y a en jeu.

JSfnet : Et puis on apprenait toujours quelque chose…
C.L. :
Oui, par exemple, les traditions et les particularités du lieu qui accueillaient l’émission : la cuisine, la gastronomie… C’était une grande encyclopédie que pouvaient regarder les grands et les petits, où chaque public trouvait son intérêt, selon sa culture. A la fin des « Jeux », on avait toujours retenu quelque chose.

JSfnet : Parlons à présent de votre relation avec les autres présentateurs…
C.L. :
Une grande familiarité et aucune jalousie. Les Jeux étaient très bien faits : chacun avait son propre rôle, celui de présenter pour son propre pays, mais parfois on échangeait nos rôles, on faisait des jeux tous ensemble… C’était cela qui nous amusait le plus. Si le présentateur s’amuse, je pense que le téléspectateur s’amuse aussi.

JSfnet : La spécificité de la télévision italienne, devenue presque un cliché aujourd’hui, ce sont les jolies filles qui entourent le présentateur. Vous mesurez votre chance ?
C.L. :
Si la présence féminine s’accompagne de professionnalisme, je n’y vois aucun inconvénient, bien au contraire… ! Il n’y a pas de différence entre un présentateur et une présentatrice. La vraie question, c’est la façon d’utiliser la femme et, surtout en Italie, je crois que nous avons dépassé les bornes : je ne vois pas pourquoi il doit y avoir une femme en maillot de bain, presque nue. Si elles dansent bien, elles peuvent rester habillées. La féminité est faite d’élégance, pas de nudité. J’espère que ce ne sera qu’une mode, parce qu’au bout du compte le public se lasse et ça ne fait même plus d’effet. Nous avons de talentueuses présentatrices, qui n’ont rien à envier aux hommes. Présenter en couple est une bonne idée, sauf si la femme n’est là que pour faire joli. De plus, rien n’empêche de mettre deux hommes ou deux femmes… l’important, c’est la complicité.

JSfnet : Peut-être qu’un jour les Jeux reviendront. On l’espère…
C.L. :
De nombreuses années sont passées, et je crois que les bonnes choses n’ont pas d’âge. Quand j’y étais, les « Jeux » n’étaient pas si compliqués que les dernières années. On a peut-être fait une erreur en compliquant les jeux, ce n’était pas indispensable…

JSfnet : Ils étaient non seulement compliqués, mais aussi plus coûteux, à tel point qu’il fut nécessaire pour abaisser les coûts de réduire les lieux de tournage avec jusqu’à un seul site par an…
C.L. :
C’est comme si tous les matchs de foot se jouaient tous dans la même ville ! « Jeux sans frontières » n’a pas sa place sur un plateau de cinéma ou dans un studio de télévision : il faut le dépaysement, les parfums des différents lieux… En France, je me souviens de Nice, de Megève en hiver… Selon moi, les dernières années, on a trop donné à faire à l’Italie, même si elle faisait bien ce qu’elle faisait.

Merci beaucoup d’avoir accepté de répondre à mes questions…
Ce fut un grand plaisir. Et n’oublie surtout pas de saluer de ma part tous les fans de l’émission ! Au revoir !

Interview réalisée en avril 2003.

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  1. J’ai regardé une fois et c’est pas trop trop mal dans l’ensemble… Mis à part un arbitre qui s’égosille un peu trop et qui doit en faire des caisses pour assurer le show ainsi qu’une présentatrice au sourire ultra-brite plus attirée par son reflet dans la caméra au lieu d’être proche et réactive avec son collègue animateur mais aussi les candidats…

    Le hasard fait généralement bien les choses…. mais bon, là, comme par hasard, c’est la dernière et sixième émission éliminatoire qui départage les deux équipes prétendantes à la finale… la joie du montage…

    Il aurait été aussi de bon ton de faire jouer les quatre équipes à chaque fois au lieu de les opposer deux à deux… On aurait additionné les scores obtenus à chaque émission et c’est l’équipe avec le plus gros total à la fin des six émissions qui serait allée en finale

    Il est surtout URGENT de revoir les règles du dernier jeu qui est complètement aberrant… Comment se permettre de traduire un écart de points en une distance, ce qui n’est pas du tout significatif et qui est difficilement convertible !!

    Une équipe peut très bien gagner jeu sur jeu et tout perdre au dernier moment, tout ça dans le but de ménager un « pseudo-suspense » à deux balles alors à quoi bon alors se fatiguer durant les épreuves si c’est pour tout perdre à la fin ?? Suffit juste de mettre des candidats costauds au dernier jeu et c’est gagné…

    Les questions de culture générale étaient plus adaptées comme dernier jeu et avaient selon moi plus de sens… Disons que les candidats faisaient fonctionner leurs jambes mais aussi leur tête !!

    Néanmoins, cette session de Jeux à la neige est moins ennuyeuse et surtout moins cheap que les Intervilles des années 2000 sur France Télévisions… Gardons espoir que Mistral Productions continue sur cette lancée à remonter la pente…

    Ce n’est pas une questions d’argent mais juste d’avoir l’envie et la volonté !!!