CATERINA RUGGERI, présentatrice suisse de 1993 à 1998 (3/3)
24 mai 2010 • Catégorie(s) : Interviews •C’est l’une des animatrices les plus aimées des fans de « Jeux sans frontières ». Pendant six ans, Caterina Ruggeri a été le visage de l’émission à la télévision suisse italienne (TSI). Dans cette troisième et dernière partie, elle nous livre des anecdotes du tournage, analyse les raisons du succès de l’émission et les causes de sa suppression en 1999.
Lire la première partie des souvenirs de Caterina Lire la deuxième partie des souvenirs de CaterinaSébastien Dias (JSfnet.fr) : A plusieurs occasions, tu as dû te mesurer au jeu des présentateurs. Comment as-tu vécu cette « épreuve » ?
Caterina Ruggeri, présentatrice pour la Suisse italienne de 1993 à 1998 : J’étais très gênée (rires), d’autant plus qu’il y a eu une période où ce jeu rapportait des points aux équipes. Porter cette responsabilité sur mes épaules me pesait. J’étais soulagée quand ça tombait sur Paolo Calissano, qui était très sportif ! Je préférais les jeux plus amusants, arrivés plus tard [en 1995, les animateurs jouent entre eux uniquement pour le plaisir, NDLR].
Pour être honnête, j’ai été traumatisée par un jeu des présentateurs que nous avons fait dans un stade à Athènes. J’ai oublié ce qu’il fallait faire ; je me souviens juste qu’à la fin du jeu, mon coéquipier – qui d’ailleurs en pinçait pour moi – devait me prendre dans ses bras jusqu’à franchir la ligne d’arrivée. Arrivés premiers, nous commençons à hurler de joie… « On est les premiers ! On est les premiers ! » Au bout d’un certain temps, je jette un coup d’œil dans les gradins et je vois Franco Thaler, mon réalisateur, vert de rage, en train de me crier tout ce qui lui passait par la tête… Je me retourne et je vois à côté de moi un podium sur lequel étaient montées toutes mes collègues. Nous pensions être premiers et nous avons fini derniers… car le temps était validé après être montée sur le podium. Pendant 3 semaines, Franco Thaler ne m’a pas dit un mot.
JSfnet.fr : Il prenait la compétition très au sérieux ?
C.R. : Les producteurs tenaient beaucoup à ce que leurs équipes gagnent. Les Hongrois et les Portugais étaient des concurrents incroyables. D’ailleurs, Attila Apro [le producteur hongrois, NDLR] recrutait toujours des équipes très fortes, de vrais funambules. Les meilleurs joueurs revenaient d’une année sur l’autre, on finissait par les reconnaître. Les Italiens n’arrivaient pas à leur niveau, malgré la présence parfois d’athlètes olympiques dans les équipes. J’ai compris les raisons de la suprématie des Hongrois à Budapest, en 1997. Nous logions dans un hôtel sur l’Ile marguerite. Sur cette île, il y a un centre sportif et il fallait voir à quel point les enfants s’entraînaient, dès l’âge de 5 ans, à devenir de grands sportifs.
JSfnet.fr : Les Hongrois ont toujours été suspectés de tricher. Qu’en penses-tu ?
C.R. : Je me souviens que les Hongrois essayaient toujours de tricher en s’échangeant les bracelets au moment du « marquage ». Le « marquage » des équipes était organisé par les arbitres était organisé le lendemain de l’arrivée des équipes. Il consistait en un tirage au sort à l’issue duquel les concurrents recevaient un bracelet avec un numéro, qui correspondait à une série de jeux dans lesquels le concurrent devait jouer. Si quelqu’un remarquait que les bracelets avaient été échangés, ça faisait un scandale et il fallait arrêter le jeu. A ce propos, le rôle des arbitres était fondamental sur le plateau. Ils étaient aussi importants qu’ils ne le sont au football.
JSfnet.fr : Quelles sont les lieux de tournage qui t’ont le plus marquée ?
C.R. : Les plus beaux décors étaient ceux des Italiens. Je me souviens du Pavillon de Chasse de Stupinigi, à Turin [en 1996, NDLR]. Le plateau n’a jamais été aussi vaste. Le scénographe Armando Nobili avait utilisé des associations de rose et de bleu clair, des damiers : un chef d’œuvre. La Villa Manin [en 1993, NDLR] était incroyable. Le Château des Sforza [en 1995, NDLR] était également très beau, même si à l’époque Milan ne s’est pas aperçue du passage des « Jeux ». C’était une trop grande métropole. A Cardiff [en 1994, NDLR], la vie s’est arrêtée pendant une semaine et on n’a parlé que des « Jeux sans frontières », surtout ceux de Noël, enregistrés en plein été avec de la fausse neige.
Comme l’Italie, le Portugal mettait toujours en avant ses joyaux architecturaux. En 1993, à Coimbra, nous étions devant une Cathédrale extraordinaire. Là-bas, un groupe d’étudiants m’avait fait la surprise de chanter la sérénade, à l’hôtel sous ma fenêtre. C’était très mignon.
Le souvenir le plus bizarre, c’était l’émission enregistrée en Grèce, à Poros [en 1994, NDLR]. On a toujours débordé sur l’horaire prévu, sauf en Hongrie, où Attila Apro très précis, très attentif, débordait tout au plus d’une vingtaine de minutes. Mais ce soir-là, nous avons fini à l’aube. J’ai des photos très amusantes où, derrière les caméras, le présentateur grec Philippos Sofianos, Iestyn Garlick, Paolo Calissano et moi nous saluons tandis que le soleil se lève. Notre plateau de fin, nous l’avons tourné une heure plus tôt, sans pouvoir féliciter les vainqueurs – encore inconnus, pour ne pas montrer la lumière du jour aux téléspectateurs. Il nous est tout arrivé : les jet-skis sont tombés en panne et on a dû faire plus de manches que prévu, un tube de plexiglas s’est brisé au passage des joueurs. On se disait tous : « Là, c’est la fin. Ils vont arrêter l’émission… » L’Italie proposait Stupingi avec la Montgolfière en ouverture et les majorettes. Et eux te donnaient 2 jets d’eau, 2 jets-ski qui ne marchaient pas et les joueurs se faisaient mal. C’était une Europe à deux vitesses.
JSfnet.fr : C’est à cause de cela que les dernières éditions ont été réalisées entièrement en Italie ?
C.R. : En 1994, à Rome, on avait fait une émission dédiée à Federico Fellini avec une Anita Ekberg de 10 mètres de haut, le Panthéon avait été recréé… La RAI ne pouvait plus se permettre de diffuser le piètre spectacle donné à Poros, ou encore les émissions tchèques qui, chaque année, recyclaient les mêmes costumes. Il y avait un tout juste une pelouse, aucun fond de décor et des costumes de personnages au nez phallique… On se demandait comment on pouvait diffuser un truc pareil ! De tous les pays de l’Est, seule la Hongrie avait un très bon niveau.
JSfnet.fr : La Suisse a organisé deux émissions en 1993, à Loèche-les-Bains…
C.R. : Oui, mais elles ont été exclusivement produites par la TSR. Là aussi, c’était très basique. Il y avait une très belle montagne en fond, illuminée. Mais cela n’avait rien à voir avec ce que faisait Armando Nobili ou les Hongrois. Chaque année, on disait à la TSI : « L’an prochain, c’est votre tour… ». La TSI a sans cesse reporté : elle avait peur, la barre était très haute.
JSfnet.fr : Selon toi, pourquoi les « Jeux sans frontières » ont été arrêtés en 1999 ?
C.R. : En Italie, « Big brother » [adapté en France sous les titres "Loft Story" et "Secret Story", NDLR] a tellement transformé la télévision italienne qu’il n’a plus été possible de faire survivre un jeu aussi artisanal. Et puis les « Jeux », la RAI n’y croyait plus. C’est ce qui a précipité sa fin. L’émission coûtait cher et il fallait de grandes chaînes de télévision qui puissent payer : l’Italie, la France… On a toujours espéré un retour de l’Allemagne, mais elle n’est finalement jamais revenue. Des télévisions comme celle de Malte, de la Slovénie ou la TSI, n’étaient pas suffisantes pour maintenir l’émission en vie. Une chaîne comme la TSI payait à l’UER en fonction du bassin d’écoute, très petit, ce qui représentait environ 10 % de ce que payait la RAI. On faisait toujours ce qu’elle disait. Cela valait aussi pour France 2.
En 1999, j’ai été invitée par la productrice Graziella Reali. Très déçue de mon départ, elle m’avait convaincue de venir au moins sur une émission. J’ai joué aux arbitres sur une émission spéciale avec des célébrités comme candidats. Je me suis dit : « ça sent la fin ». Il n’y avait plus la même ambiance entre les producteurs. Graziella m’a alors confié : « Je n’en peux plus. C’est la dernière année. J’ai besoin de m’amuser et là je ne m’amuse plus.«
Cette année-là, des erreurs ont été commises. Par peur de ne pas suffire au public, on s’est écartés de l’ADN des « Jeux » : les jeux, les équipes, l’esprit de groupe, de beaux décors et costumes et surtout de la simplicité. Ils ont eu tort de choisir la Calabre profonde. Ils ont eu des difficultés techniques : travailler dans le Sud de l’Italie n’est pas simple. Le Castella, c’était un lieu magnifique, mais à l’époque il n’y avait pas encore les villages de vacances. C’était une terre à l’abandon avec vue sur la mer et un tout petit village. Face à ce décalage, difficile de se sentir à l’aise.
Un grand merci à Caterina ainsi qu’à la petite Angelica
qui est restée très sage pendant que sa maman répondait à nos questions !
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J’ai regardé une fois et c’est pas trop trop mal dans l’ensemble… Mis à part un arbitre qui s’égosille un peu trop et qui doit en faire des caisses pour assurer le show ainsi qu’une présentatrice au sourire ultra-brite plus attirée par son reflet dans la caméra au lieu d’être proche et réactive avec son collègue animateur mais aussi les candidats…
Le hasard fait généralement bien les choses…. mais bon, là, comme par hasard, c’est la dernière et sixième émission éliminatoire qui départage les deux équipes prétendantes à la finale… la joie du montage…
Il aurait été aussi de bon ton de faire jouer les quatre équipes à chaque fois au lieu de les opposer deux à deux… On aurait additionné les scores obtenus à chaque émission et c’est l’équipe avec le plus gros total à la fin des six émissions qui serait allée en finale
Il est surtout URGENT de revoir les règles du dernier jeu qui est complètement aberrant… Comment se permettre de traduire un écart de points en une distance, ce qui n’est pas du tout significatif et qui est difficilement convertible !!
Une équipe peut très bien gagner jeu sur jeu et tout perdre au dernier moment, tout ça dans le but de ménager un « pseudo-suspense » à deux balles alors à quoi bon alors se fatiguer durant les épreuves si c’est pour tout perdre à la fin ?? Suffit juste de mettre des candidats costauds au dernier jeu et c’est gagné…
Les questions de culture générale étaient plus adaptées comme dernier jeu et avaient selon moi plus de sens… Disons que les candidats faisaient fonctionner leurs jambes mais aussi leur tête !!
Néanmoins, cette session de Jeux à la neige est moins ennuyeuse et surtout moins cheap que les Intervilles des années 2000 sur France Télévisions… Gardons espoir que Mistral Productions continue sur cette lancée à remonter la pente…
Ce n’est pas une questions d’argent mais juste d’avoir l’envie et la volonté !!!